Par respect pour nos agriculteurs, l'honnêteté et la responsabilité de
rétablir deux ou trois vérités...
Au cœur de cette énième crise agricole, le fait pour
un petit exploitant de ne pouvoir tirer un revenu décent de son rude travail
est une réalité qui nous révolte tous. Pour autant, un éclairage essentiel
n'apparaît pas (ou peu) : le système agro-alimentaire en place n'est
malheureusement pas « grippé ». Et ce serait même ici tout le
contraire ! Il ne fait en réalité que fonctionner (diaboliquement bien)
dans la logique particulière qui est la sienne.
A savoir : une concentration toujours plus
importante des unités de production, pour produire toujours plus, pour des prix
toujours plus bas, et donc, dans toute la logique d'un « marché libre et
non faussé », pour une disparition d'un nombre croissant de petits
agriculteurs (et du modèle familial sous-tendu).
La « ferme des 1000 vaches » est une
parfaite illustration de la logique dévastatrice à l'oeuvre ; et elle
n'est elle-même encore qu'un tout petit aperçu de ce qui se produira si le
traité en cours de négociation avec les Etats-Unis d'Amérique (TAFTA) venait à
être signé par nos dirigeants !
A terme l'agriculture ne serait plus affaire
d'agriculteurs. Gouvernement et dirigeants du syndicat agricole majoritaire en sont
non seulement conscients, mais de surcroît, ils soutiennent cette évolution
« mégalo industrielle ». Leur relative discrétion en cette période
difficile n'en constituant qu'un nouvel aveu...
Tous les discours prônant l'aide à la trésorerie, la
réorganisation des filières ou encore l'appel au patriotisme, ne cachent en
réalité qu'hypocrisie et larmes de crocodiles.
Ainsi que l'exprimait un manifestant sur son
tracteur (« Il faut changer de logiciel ! » ), il
est aujourd'hui plus que temps pour nos décideurs d'arrêter d'envoyer nos
jeunes dans cette impasse mortifère.
Changeons donc, non seulement le logiciel, mais
également le système d'exploitation qui le fait fonctionner !
Car l'avenir de nos agriculteurs (et de nos territoires ruraux) réside
dans notre capacité à tous, à renouer les liens entre habitants et producteurs
locaux en vue d'une consommation de proximité et de qualité. Et ceci passe,
entre autres, par la détermination sans faille de nos élus locaux à soutenir
les outils structurels nécessaires à cette indispensable mutation. L'abattoir
menacé de Pont-Croix en constituant un parfait exemple...