
Le nouveau film de Michale Boganim offre une vision intime de la catastrophe de Tchernobyl. Un film fort qui a reçu le Prix du public pour la Meilleure fiction au Festival du Film International d’environnement.
Il
a fallu quelques heures pour que tout bascule. En ce 26 avril 1986, la
vie suivait son cours à Pripiat, petit village proche de Tchernobyl.
Anya et Piotr célèbrent leur mariage, le petit Valery et son père
Alexeï, ingénieur à la centrale, plantent un pommier, Nikolaï, garde
forestier, fait sa tournée habituelle dans la forêt… Puis l’accident
nucléaire a eu lieu, et rien n’a été épargné. Les populations sont
évacuées brutalement. Réquisitionné pour éteindre l’incendie, Piotr ne
reviendra pas. La nature subit de plein fouet la pollution radioactive :
les animaux des fermes s’agitent et cherchent à fuir, les feuilles des
arbres se dessèchent, les poissons du lac flottent à la surface par
centaines… Alexeï, condamné au silence par les autorités, préfère
disparaître.
Dix ans plus tard, Pripiat, ville fantôme désertée par ses habitants, est devenue un no man’s land, gigantesque Pompéi moderne érigé en un étrange lieu de tourisme… Anya travaille comme guide dans la zone, tandis que Valery y cherche les traces de son père et que Nikolaï, lui, persiste à cultiver son jardin empoisonné.
Film
de fiction, La Terre outragée retrace l’histoire de destins brisés par
la catastrophe. Michale Boganim est allée à la rencontre de ceux qui ont
vécu cette journée de 1986 pour écrire un scénario fidèle à la réalité.
« À la manière des anthropologues, j’ai vécu avec les gens pour aller
vers l’intime », raconte-t-elle. L’événement en soit reste « hors-champ
», la réalisatrice ne voulait pas « montrer la catastrophe elle-même. Le
défi, c’était de faire un film, de tourner des images sur l’invisible
». A Pripiat, le temps a été vitrifié par l’explosion et s’est
transformé en éternité. « Aujourd’hui, c’est comme si la nature avait
gagné sur l’homme, avait mieux résisté. Pripiat est devenu un paradis
pour les animaux, la forêt a envahi la ville, il y a plein d’animaux
sauvages partout, des chevaux en liberté, des loups… La végétation est
resplendissante », note la réalisatrice.